FIRST || Calcutta . Les pleurs d'un enfant venant de naître se faisait entendre ici.
Ici : endroit entre toutes les merdes de ce monde et des tas d'ordures. Où hommes complètement saouls côtoyaient les agresseurs et agressés. Là où on pouvait vous torturer, vous détruire, vous faire crever devant une foule de personne impassible devant cette violence qu'on aurait décrit comme inhumain... Mais qui était tout à fait banal ici. Cette banalité rendait les gens encore plus inhumains qu'ils l'étaient déjà à vivre dans l'endroit où les pires cauchemars ne pouvaient même pas rivaliser avec ces ténèbres bien pire qu'on l'aurait imaginé. Personne n'aurait voulu connaître cette ruelle dénudé de gaieté à souhait. Personne. Sauf ceux qui n'ont jamais connus et ne connaîtront jamais autre que ce lieu. Ces gens ne verront jamais à quel point ils sont inhumains, déchirés, sales. Il ne connaîtront jamais le bonheur. Mais ce qu'on pourrait presque leur envier, c'est qu'eux, ne connaîtront jamais la tristesse... Car ils n'auront jamais connu autre. On pourrait dire que ce sont des ignorants, pourtant qui sait à quel points ils sont véritables. Ils ne se mentent pas - à quoi bon ? -, ils vivent de jour en jour, sans prendre un chemin tout tracer.
Ici. Dans ce misérable endroit, où seul la vérité compte, venait de naître Ashleigh Stanford.
On ne sait pas pourquoi une fille avec un tel prénom venait de naître. On savait seulement que sa mère était une foutue blanche, une pute, une prostituée... Nommez-la comme vous voulez. Elle vivait une vie précaire, l'arrivée d'un enfant n'était donc pas la bienvenue. Elle garda tout de même le bambin avec elle. " L'instinct maternelle" dit-on, mais cet instinct fut bientôt mis à rude épreuve. Des années passèrent, à manger une bouchée de pain chaque jour. Ashleigh aurait très bien pu mourir de mal nutrition, mais elle était plus résistante que prévu. La jeune femme espérait pourtant qu'un jour, cet enfant arrête de respirer, ne lui vole plus ce qu'elle gagne dur durant la journée. Ce jour arriva.
Elle n'avait eu aucun client ce jour-ci, à peine assez de sous pour acheter de quoi se mettre dans le ventre. Mais si elle achetait quelque chose, elle aurait dû partager avec sa fille - âgé maintenant de quatre ans - et elle ne voulait pas. La faim l'avait amaigri, mais aussi rendu aussi sauvage qu'un animal lâché dans une foire. L'instinct de survie. Personne n'a jamais dit lequel était le plus fort, l'instinct de survie ou l'instinct maternelle ? En tout cas, du côté de cette femme, ce fut sa survie qui compta le plus à ses yeux. Elle abandonna donc sa fille sur le bord d'une route. En attendant qu'une personne gentille viennent la prendre, comme un chiot qu'on aurait posé sur un trottoir... Mais ici, ça n'existait pas. Ici, vous aurait beau crier, pleurer, hurler, personne ne viendrait vous voir. Elle abandonna donc sa fille sur le bord d'une route. En attendant qu'une personne gentille viennent la prendre, comme un chiot qu'on aurait posé sur un trottoir... Mais ici, ça n'existait pas. Ici, vous aurait beau crier, pleurer, hurler, personne ne viendrait vous voir.
Ashleigh ne reçu jamais d'aide. Elle survécut. D'une certaine façon, on peut dire qu'elle resta en vie. Mais c'était une coquille vide. Sa seule pensé le matin, c'était trouvé le déjeuner. L'après-midi, trouver de quoi manger pour le dîner. Le soir, trouver un endroit sûr où dormir. C'est à peine si elle avait une quelconque personnalité. Elle tenue ainsi un jour, une semaine, deux semaines, un mois, des mois entiers ! Un an passèrent. Un an de vide totale. Dans ce genre de moment, on ne pense même plus à se sauver. C'est ainsi qu'on passe des années à vivre dans la misère et l'inhumain... Ce ne fut pas son cas.
Sauver par le destin par une main de maître ? Un coup de chance ? Ou un affreux malheur ? Qui sait. Ce jour arriva, où elle fut soudainement enlevée de son chez soi, de l'endroit qu'elle aurait pu chérir de tout son coeur, arraché du lieu où elle vécut pendant déjà six longues années... Elle venait à peine d'avoir six ans et... Sa mère revint. Cela ne faisait ni chaud ni froid à Ashleigh, ces deux années passées à airer dans les rues misérables l'avait rendu aussi insensible qu'une pierre face au néant. Les retrouvailles ne durèrent à peine quelques heures. Ashleigh ne lui parla même pas, en y repensant, cela fait des années qu'elle n'a pas prononcé un mot, qu'elle n'a pas sortie un son. Alors, quand elle en prit conscience, encore dans les bras de sa mère, elle essaya de prononcer un simple « Ah ». Impossible. Impossible. Impossible impossible impossible ! Pour la première fois de son existence elle fut préoccupée par quelque chose : elle n'arrivait plus à parler. Elle avait beau essayer, rien ne sortait. Avait-elle avaler trop de merdes pendant tous ce temps qu'elle en avait perdu l'usage de la parole ? Qui sait.
Sa mère la posa brutalement au sol, face à un homme. L'enfant écouta leur conversation. On voulait la vendre ? Cela ne l'intéressait que très peu. Avoir un père ou une mère, il n'y avait jamais rien eu d'aussi inutile dans sa vie.
Et pourtant... ce point de vue changea du tout au tout. Elle en aurait presque voulu revenir à son ancienne vie des rues.
SECOND || London . Elle fut emmenée à Londres. Ville beaucoup plus calme de ce dont elle avait l'habitude. Mais ces voitures allaient beaucoup plus vite qu'à Calcutta, ce qui avait le don d'énerver Ashleigh. La colère. C'était il y a bien longtemps qu'elle n'avait pas ressenti cette sensation. Oui, tout était bien tranquille jusqu'à ce que cet homme brise sa monotonie habituelle. Elle comprit vite que tout allait changer, et ce fut le cas...
Elle recevait une meilleure nourriture qu'en Inde, mais elle était accaparée de boulot, et le pire c'est qu'elle ne comprenait pas un mot de ce que cet homme racontait. Elle ne pouvait pas lui dire qu'elle ne le comprenait pas : ces paroles s'étaient éteintes et personne ne pouvait les lui rendre. La gamine ne pouvait plus parler et on dirait que personne ne l'avait remarqué.
Elle apprit vite à comprendre quelques mots de cet anglais. Parce qu'à chaque fois qu'elle ne faisait pas la bonne corvée et qu'elle se trompait, elle était frappée, puni. Mais jamais privé de nourriture, ce qu'elle trouvait vraiment étrange. Au moins, elle n'avait plus à se préoccuper de la nourriture à trouver. Elle travaillait nuit et jour, sans relâche. La maison du « Master » comme il l'obligeait à l'appeler était aussi grand qu'un château. Et tout ce qu'elle avait pour nettoyer, c'était un chiffon et une brosse à dent. Sa vie était devenue pire que tout et tomber plus bas était impossible.
Elle vécut ainsi pendant des années, jusqu'à ce qu'enfin, un de ces fameux miracles qui l'avait emmené ici la sauva.
Elle avait déjà dix ans, quand elle le rencontra.
Ashleigh était sortie faire les courses, comme lui avait demandé le Master. Il n'avait pas changé en quatre ans et était toujours aussi dur. Il avait peut-être compris qu'elle était muette mais n'y prêtait aucune intention. « Au moins elle me fera pas chier à gueuler quand j'la frappe, cette foutue mioche ! » Il la traitait ainsi tous les jours, jamais cela ne devait s'arrêter. Les achats furent faits à une vitesse record, elle pensait retourner chez elle quand Ashleigh bouscula, par inadvertance, un passant.
Elle se courba très bas en guise d'excuse. Elle n'avait pas l'habitude de rentrer dans les gens de cette façon et c'était bien plus gênant qu'elle aurait pu penser. Manque de pot, la personne - plus précisément l'enfant - qu'elle bouscula était aveugle et son nom était Terry-James Taylor. Elle apprit son prénom après une gueulade qui dura au moins un quart d'heure. Ashleigh ne broncha pas, il pouvait crier autant qu'il le voulait elle s'était excusée, même s'il ne l'avait pas vue. Elle pensait partir pendant qu'il était encore en pleine dispute, mais elle fut soudainement interrompue par le soudain ton calme du gamin, dont on vit soudainement à quel point il était âgé par rapport à elle. D'à peine quelques années sûrement, mais quand on est jeune, un an d'écart se voyait beaucoup plus qu'en étant âgé.
Ashleigh, voulu-t-elle répondre. Elle ouvrit la bouche aucun son ne sortit. Restant bloquée ainsi pendant quelques secondes, elle se demandait comment elle allait lui répondre ? Master ne lui avait jamais demandé son prénom, donc aucune personne dans cette ville ne le connaissait... Et puis, elle ne savait pas écrire. Ces quelques secondes passées, elle voulut tout de même lui montrer sa présence. Elle lui attrapa le poignet, soudainement et avec force. Le garçon fit une grimace, non pas de douleur, mais le genre d'expression qui dit "Qu'est-ce que tu fous là ?". Elle ne savait pas trop comment réagir, elle était pourtant quelqu'un de très assuré normalement ! Elle était exaspérée, dans un dernier geste de désespoir, elle lui frappa d'un coup sur le front, juste pour lui montrer qu'il était un pauvre idiot. Elle partit.
Tout aurait très bien pu s'arrêter là, mais non. Elle le rencontra encore une fois la semaine d'après. Et, le voir encore une fois, l'amusa. Comme une enfant devant une attraction. À dix ans, on n'est pas plus mûr que ça. Elle s'approcha et s'assied à côté de lui en silence. Ce jeu l'amusa encore pendant des semaines. Jusqu'à ce que la question resurgisse.
« Qui es-tu ? »
Aucune réponse.
« Moi c'est Terry-James. Et toi ?»
Elle ne savait pas quoi faire, encore une fois. Elle ne réfléchit pas beaucoup à ce moment-là : elle le tapa sur son front avec violence.
Triple idiot ! On pouvait traduire ça comme ça. Elle repartit rapidement chez elle.
Rien n'avait changé avec le Master, sauf qu'il commençait à lui donner des coups gratuits. Des excès de colères, sûrement, il s'énervait assez souvent, mais jamais il s'était défoulé sur Ashleigh. Tous les jours, elle se fit frappé. Il ne lui donnait plus aucun ordre, il fallait juste qu'elle lui fasse à manger et c'était assez. Elle ne voulait pas savoir pourquoi il était autant en colère, mais elle commençait sérieusement à souffrir de ces coups.
La fin de la semaine approcha, le jour des courses aussi.
Après avoir acheté tout ce dont elle avait besoin, elle alla s'asseoir comme à son habitude à côté de Terry-James. Elle aurait aimé qu'il arrête de poser des questions. Mais à chaque fois qu'il brisait la monotonie, les habitudes de la jeune fille en parlant, cela la perturbait énormément. Elle n'aimait pas quand ces moments ne devenaient plus aussi prévisible qu'avant. Ce jour-là, il semblait encore la laisser tranquille. Ashleigh l'entendit alors respirer bruyamment. Elle tourna la tête pour voir ce qu'il se passait, mais elle n'eut pas le temps. Une main attrapa sa tête, comme on attrape un ballon. Elle sentit cette main rouvrire les quelques contusions qu'elle avait subit lors des colères du Master. Cette main, c'était celle de Terry-James. Il s'était levé sans même qu'elle le remarque et la plaquait maintenant contre le dossier du banc.
« Tu as mal ? »
Elle hocha la tête positivement. Elle voulait qu'elle le lache. Elle lui attrapa le bras pour essayer de la retirer. Impossible.
« Qui t'as fait ça ? »
Elle paniqua.
« Emmène-moi chez toi. »
Elle se figea. Elle ne pouvait pas. C'était tout aussi impossible de lui répondre oui.
« C'est tes parents qui t'ont fait ça ? »
Elle ne voulait pas répondre.. D'une certaine façon, lui avouer ça, c'était tellement humiliant.
« Réponds, merde ! »
Oui.. Elle fit un signe de la tête et la main fut enfin retiré.
Ces blessures s'étaient remises à saigner, mais peu lui importait. Terry-James, son "ami" qu'elle croyait être aussi immature qu'un enfant de son âge sortit une arme. Un couteau comme on en voit plus de nos jours : un couteau fin et long, dont l'utilisation en cuisine aurait étonnée la fillette. Ashleigh le regarda faire : nettoyer avec délicatesse la lame, le prendre dans ses mains... Il chouchoutait cette arme avec une telle intention. Il lui attrapa le poignet et sans poser une question, sans dire un mot, elle l'emmena vers sa maison. Elle n'avait pas peur du sang, ni du couteau. Elle en avait vu des milliers se balader de main en main à Calcutta. Après avoir paniqué pour la vie de son Master, elle se redonnait raison. Peut-être qu'il l'avait sauvé des bidonvilles, mais maintenant Ashleigh n'avait plus besoin de lui. Alors qu'il crève pour qu'elle soit enfin libre. Les chaînes qui retienent Ashleigh, c'est lui qui les tient. L'abattre. Voilà donc la solution qu'elle recherche depuis si longtemps ! Arrivé devant la maison, elle sonna simplement à la porte.
On entendit quelqu'un râler derrière la porte. Elle s'ouvrit à la voler, laissant voir le visage déformé par la rage du vieil homme. Il allait crier sur la mioche quand il eut à peine le temps de voir apparaître un autre gamin et le bout du couteau pointé vers lui. Un coup entre les deux yeux, le sang gicla sur le visage souriant d'Ashleigh.
Elle était enfin libre. Ashleigh Stanford est libre !
Nous étions le 21 juin 2033. Joyeux anniversaire.
Le lendemain, un article du journal :
- Citation :
- Mort d'un génie.
Hier, Anthony Nill O'Nym s'est éteint à l'âge 70 ans, par un coup de couteau. Il était l'inventeur du plus puissant micro-turbo que le monde ait connu et allait bientôt recevoir le grand prix de La Micro Mécanique de la Science.
A. N. O'Nym aurait été assassiné d'un seul coup porté mortelle. Selon les enquêteurs : « Il est mort avant même avoir touché le sol. Le coup n'aurait pas pu être tiré par un amateur, il beaucoup plus difficile qu'il n'y parait de porter en un seul coup la mort d'une personne. C'est sûrement un professionnel qui a agi, pour des motifs qui nous sont encore inconnus ». Les voisins le décrivent comme « Un homme isolé » « On n'avait jamais aucun problème avec lui ». Pourquoi aurait-on donc tué un homme sans histoire ? La police privilège toutes les pistes pour le moment.
FINAL || Liscanor . Ashleigh se fit par la suite passer pour la fille qu'avait adopté Mr. O'Nym. Muette, elle essaya de faire comprendre son prénom aux personnes. Ce fut un autre jeu idiot : "Dites une syllabe et je vous dis si c'est OK".
Aucun papier pour prouver l'adoption du défunt, mais il suffit de montrer qu'elle avait belle et bien une chambre dans la maison pour montrer qu'elle le connaissait. Malgré les papiers inexistants, toutes les choses administratives furent rempli pour l'adoption de la petite Ashleigh. Elle partit pour l'Irland, dans la commune du Liscanor. On ne connaît ni l'identité de ces tuteurs, ni ce qu'il se passa pendant ces dernières années. On sait juste qu'elle réussit à obtenir un Euphoria, le jeu le plus en vogue du moment, d'une façon ou d'une autre...
Après son départ en Irland, elle perdit tout contact avec Terry-James. Elle ne s'inquiéta pourtant pas pour lui : il sait se débrouiller seul...